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Les enjeux de la Collectivité Territoriale d'Alsace (anciennement Conseil Unique d'Alsace) : des éléments pour débattre. Institutions d'avenir ou illusion collective ? --- Analyses proposées par Mathieu Lavarenne, président du Cercle Républicain 68 Edouard Boeglin et conseiller municipal (indépendant) dans un petit village alsacien. Plus de 22 000 visiteurs uniques en quelques semaines. Blog qui a "fait se dresser les cheveux sur la tête" de Philippe Richert, référencé par France Info.

Réforme territoriale – Adieu, référendum...

 

 

 

Réforme territoriale – Conseil d'Alsace

 

 


Adieu, référendum...


 

 

 

feu-referendum.jpgAlors que les débats et commentaires se sont focalisés sur l'article 1 du projet de loi « relatif à la délimitation des régions », déposé au Sénat par le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve, le 18 juin 2014, l'article 3 a malheureusement été globalement passé sous silence. Il a pourtant été au coeur de ce qui était en train de se passer, en supprimant l'obligation de consulter les citoyens pour les modifications territoriales. A l'avenir, le jeu de meccano institutionnel se fera donc dans l'entre-soi des élus locaux. Aux citoyens d'être vigilants durant les campagnes électorales pour les départementales (en mars 2015) et les régionales (en décembre 2015), s'ils veulent avoir encore leur mot à dire. Et quoiqu'il arrive, les abstentionnistes auront tort.



A droite comme à gauche, trop jaloux du pouvoir ainsi accordé, les élus alsaciens (et bien peu ailleurs) n'ont donc pas levé le petit doigt pour sauvegarder la condition de référendum concernant les évolutions de collectivités territoriales. La procédure référendaire aurait pourtant réglé bien des débats : la grande région ALCA ne serait sans doute pas passée (de même que d'autres). Pas plus, il est vrai, que le conseil unique d'Alsace, déjà refusé par les urnes et objet d'un considérable acharnement thérapeutique de la part des élus qui ont précisément "raté" le référendum du 7 avril 2013. Ne parlons même pas d'un référendum national qui soumettrait à l'approbation de tous les citoyens français la réforme territoriale dans sa globalité. La claque serait assurée, tant le désamour est important, mais aussi du fait de la nature d'une réforme dont on ne perçoit pas la nécessité, risquant même de déstabiliser l'architecture de notre pays pour un bon moment. Car les batailles de chiffonniers sont loin d'être terminées : si la loi, par dérogation dans son article 2, fait de Strasbourg le « chef-lieu de sa région », il n'est pas sûr encore que l'assemblée y siège... et l'on ne sait toujours pas ce que seront les compétences de l'Eurométropole strasbourgeoise ni si elles seront compatibles avec celles de la grande région… Entre autres.



Rappel des faits.

 

JUIN-JUILLET 2014

Au Sénat – première lecture


Dans le cadre de la loi sur la réforme des régions, suite à un amendement proposé le 25 juin 2014 par le rapporteur Michel Delebarre (PS), le sénat a adopté le 4 juillet suivant la suppression de la condition de référendum pour les fusions de collectivités régionales ou départementales. Seules suffiraient les délibérations concordantes des collectivités concernées, à la majorité des suffrages.

 

NB – Si cette disposition avait existé, la consultation des Alsaciens le 7 avril 2013 n'aurait pas eu lieu, et les conseillers régionaux et généraux alsaciens auraient purement et simplement adopté le Conseil Unique d'Alsace, sans demander l'avis du peuple. Est-ce cela que certains osent appeler la réforme « jacobine » d'un Etat centralisateur : une réforme qui permet à des élus locaux, qui n'ont pas été élus sur ce programme, de faire ce qu'ils veulent avec les Institutions françaises, quitte à les déséquilibrer, sans consulter les citoyens ? On marche à l'envers. Les grands réformateurs de la révolution française, attachés à l'universalité des droits, à l'unité des institutions républicaines et à l'abolition des privilèges, se retournent dans leur tombe.



JUILLET 2014

A l'Assemblée Nationale – première lecture


Suivant la procédure accélérée imposée par le gouvernement, le texte adopté par l'Assemblée nationale le 23 juillet 2014 confirme cette suppression de la consultation populaire. Même lorsque les nouvelles régions seront votées, des modifications de limites régionales pourront être décidées, mais avant le mois de mars 2019. Selon ce qui est nommé le « droit d'option », les départements auront encore la possibilité de changer de régions (ou certaines grandes régions de fusionner en méga-régions, pourquoi pas), sur simple décision majoritaire des élus locaux. Les fusions de départements n'ont quant à elles pas de date butoir, de même que les fusions des départements et de la région d'appartenance en une collectivité unique. Cette disposition restera.

 

NB – Quand la grande région Alsace-Lorraine-Champagne-Ardenne verra le jour, il restera donc possible aux élus alsaciens de voter pour la fusion des deux départements en une seule collectivité départementale, sans consultation des citoyens. Certains ne voulaient ni de la région ALCA, ni du Conseil unique d'Alsace, il se pourrait bien qu'il y ait les deux.



OCTOBRE 2014

Au Sénat – seconde lecture


Dans la version votée par le Sénat en deuxième lecture, le 30 octobre dernier, au lieu de la majorité, il devient nécessaire d'atteindre les 3/5 d'élus exprimés dans les assemblées délibérantes pour le droit d'option des départements et les fusions. Malgré l'ajout de ce garde-fou, l'obligation de consulter les populations reste supprimée.



NOVEMBRE 2014

A l'Assemblée Nationale – seconde lecture


La suppression de la condition de referendum est confirmée une nouvelle fois par l'immense majorité des élus. Conséquence des échecs successifs des différentes consultations en Corse, en Guadeloupe, en Martinique, en Guyane ou encore en Alsace depuis 2003 ? Comme le thermomètre n'indique pas la température souhaitée, le choix est donc de s'en défaire.

Le cas alsacien a été omniprésent dans les débats, au point que M. Carlos Da Silva, rapporteur de la commission des lois, s'en est servi pour justifier l'abolition du référendum, lors du débat sur l'article 3, jeudi 20 novembre : « La commission est défavorable à cet amendement [proposé par le député Marc Dolez et qui demande de rétablir l'obligation de consultation] parce que cette voie référendaire a été utilisée une seule fois… avec une forme d’insuccès. » Autrement dit, les Alsaciens n'ont pas adopté le projet (abstention massive et non du département du Haut-Rhin), il faut donc cesser de consulter les citoyens. CQFD. Pourquoi n'a-t-on pas entendu nos députés alsaciens élever la voix à ce moment-là ? Dommage aussi que la presse soit restée quasi-muette sur le sujet.


On n'en croit d'ailleurs pas ses oreilles lorsque l'on entend André Vallini, secrétaire d’État chargé du dossier, avant le vote de l'Assemblée : « En l’état actuel du droit, pour qu’un département quitte une région pour en rejoindre une autre, plusieurs conditions doivent être réunies. Une délibération doit être adoptée par le département qui souhaite changer de région, par la région qu’il veut quitter et par celle qu’il veut rejoindre. À cela s’ajoute l’organisation non pas d’un, mais de trois référendums [ndlr : André Vallini omet toutefois de préciser qu'ils sont organisés en même temps comme s'il n'y en avait qu'un, mais cela fait partie de la construction rhétorique de son argumentation], dans la région d’origine, dans la région d’accueil et dans le département concerné, avec une condition de participation minimale de 25 % pour chacun de ces trois référendums. Concrètement, en l’état actuel de la législation, la mise en œuvre du droit d’option est donc verrouillée – permettez-moi d’employer cette expression, qui a été utilisée assez souvent – du fait de l’obligation d’organiser ces trois référendums. En supprimant ces derniers en première lecture, le projet de loi dont nous discutons a donc considérablement assoupli le droit d’option. » Mais comment ose-t-on parler ainsi du référendum et du peuple quand on est un membre de son gouvernement ? Consulter le peuple pour des réformes institutionnelles, ce serait donc un verrou ?!? Et se débarrasser des citoyens, ce serait ce qu'on appelle pudiquement assouplir en novlangue !? La crise de légitimité est bien profonde.



NB – Le débat dans l'hémicycle de l'Assemblée Nationale a aussi été marqué par des débordements vulgaires et indignes en ce lieu de la part de certains députés alsaciens (certains sont allés jusqu'à qualifier le projet de région Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine de AArChLor, un acronyme dont la prononciation à l'alsacienne produit l'effet d'un juron bien en-dessous de la ceinture, côté pile). Il faut dire que le député PS Philippe Bies avait appuyé là où cela faisait mal, à savoir la Marseillaise, certes chantée, mais aussi sifflée lors de la manifestation du 11 octobre par les autonomistes présents en masse dans la foule, ou encore l'absence de drapeaux français, y compris à la tribune, la faible présence de drapeaux régionaux et départementaux, et la présence ultra-majoritaire de ces drapeaux « rouge et blanc » datant de 1912 pendant l'annexion prussienne et adopté par lesdits autonomistes. Les propos étaient certes polémiques, mais ne justifiaient pas des réactions d'aussi bas-étage, qui ont d'ailleurs plutôt desservi la cause qu'elles voulaient défendre.

Ces dérives n'ont toutefois été possibles que parce que le gouvernement a justement ouvert la boîte de Pandore des identités par cette réforme territoriale au minimum inutile voire contre-productive, en ce qu'elle ne répondra pas aux problèmes de notre pays, mais prend sa part dans le retrait de l’État et la mise en compétition des régions au sein de l'Europe. L'avenir nous éclairera lorsque l'on parlera des compétences. Sans compter les fractures et plaies identitaires qui ont d'ores et déjà été (ré)ouvertes à l'occasion de ce débat. Dès 2012, nous craignions dans ces pages, les dérapages et autres régressions potentielles. L'actualité nous a hélas donné raison. Par ricochet, on peut penser que les prochaines élections seront lourdes de surprises... pas forcément agréables.

 

A noter enfin, à propos d'élection, que le nombre de conseillers régionaux défini dans l'article 6 de la même loi a globalement augmenté : rien qu'en Alsace, ils passeront de 47 à 60. Economies et simplification, qu'ils disaient ?

 

M.L.





 

 

   *   *   *   *   *   *   *   *   *   *   *   *   *   *   *

 

PS : Voici l'article 3 tel qu'il a été voté ce mardi 25 novembre. Derrière une prose alambiquée de nature à perdre ou tout au moins à rebuter les citoyens, chacun des petits b) entérine la suppression de l'obligation référendaire.

 

« Article 3

I. – À compter du 1er janvier 2016, le code général des collectivités territoriales est ainsi modifié : 

1° L’article L. 3114-1 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa du I, après le mot : « généraux », sont insérés les mots : « , adoptées à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, » ;

b) Le II est abrogé ;

2° L’article L. 4122-1-1 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du I, après le mot : « délibérantes », sont insérés les mots : « , adoptées à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, » ;

b) Le II est abrogé ;

c) (Supprimé)

2° bis L’article L. 4123-1 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa du I, après le mot : « régionaux, », sont insérés les mots : « adoptées à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, » ;

b) Le II est abrogé ;

c) (Supprimé)

3° L’article L. 4124-1 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa du I, après le mot : « région », il est inséré le mot : « métropolitaine » et, après le mot : « délibérantes », sont insérés les mots : « , adoptées à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés, » ;

b) Le II est abrogé. »

 

 

 

 

70 ans apres-copie-4--> "Jetzt langt's" : maintenant ça suffit (30 novembre 2014) - Où l'on verra que pendant les commémorations officielles de la libération de la ville de Strasbourg 70 ans plus tôt, un millier de personnes ont manifesté contre la fusion des régions : parmi eux des fanatiques ont hué des anciens combattants, d'autres ont dérobé des drapeaux bleu-blanc-rouge, d'autres encore ont arboré de nauséabonds slogans...L'autonomisme est aujourd'hui décomplexé.

 

 

conseil alsace reforme territoriale--> Conseil d'Alsace - Réforme territoriale - Les alchimistes du "oui" (1er novembre 2014) - Où l'on verra qu'après avoir voulu faire passer une complexification pour de la simplification, lors du pseudo débat de 2013, voilà maintenant qu'on voudrait nous faire avaler que l'échec du référendum du 7 avril serait en fait une victoire volée !

 

 

 

Couple alsacien-copie-3--> Les conseils (d'Alsace) du Dr Guido BUTTCHERT : Toute ressemblance avec des événements réels ou avec des personnalités connues, comme Guy-Dominique Kennel, Charles Buttner et Philippe Richert, est évidemment totalement fortuite.


 

chronologie CUA sommaire-copie-2--> Conseil unique d'Alsace - Le rappel des faits - Chronologie 2010-2014 (25 octobre 2014) - Où l'on pourra se remémorer les faits depuis l'autorisation légale de l'expérimentation institutionnelle en décembre 2010 jusqu'au retour forcé du conseil unique d'Alsace par la fenêtre, après qu'il ait été sorti par la grande porte du référendum.

 

 

 

 

amendement senat alsace--> Conseil Unique d'Alsace le retour - L'amendement du Sénat (22 octobre 2014) - Où l'on verra que la campagne de mauvaise foi contre les résultats du 7 avril a des répercussions au Sénat où de nombreux Alsaciens, légitimement hostiles à la grande région Alsace-Lorraine-Champagne Ardenne, sont fait cocus par leurs élus...

 

 

 

Manifestation 11 octobre copie--> Conseil d'Alsace et réforme territoriale – Manifestation du 11 octobre – Une manifestation en demi-teinte (12 octobre 2014) - Où l'on verra que la manifestation du 11 octobre n'a pas été à la hauteur des espérances, pour avoir soufflé sur les divisions plutôt que sur une volonté de rassemblement.

 

 

 

citoyens en colere 2 copie--> Retour du conseil d'Alsace - Les ficelles (médiatiques) sont un peu grosses - Halte aux manipulations ! (où l'on verra comment les électeurs qui ont voté non le 7 avril 2013 sont rayés de la carte par un "sondage" réalisé dans la presse locale)

 

 

Manifestation du 11 octobre Strasbourg 2-->  Tarif spécial - La mascarade du 11 octobre (4 octobre 2014) - Où l'on verra que le Conseil d'Alsace outrepasse ses prérogatives pour soutenir une manifestation à caractère politique en demandant à la SNCF de mettre en place un tarif TER spécial de 5€.

 

 

22 septembre vote des trois conseils alsace--> Vote du 22 septembre 2014 en Alsace : l'orage n'a pas fini de gronder (où l'on verra la trahison des élites à l'égard du suffrage populaire exprimé lors du référendum du 7 avril 2013)

 

Richert retour du conseil d Alsace--> Retour du Conseil Unique d'Alsace - Crise de légitimité et responsabilité politique (18 septembre 2014) - Où l'on verra combien nos élites semblent avoir perdu le sens de la démocratie et de la République. Que l'on ait voté pour ou contre en Alsace lors du referendum du 7 avril 2013, cela doit choquer. Et cela choquera. Les nuages continuent de s'amonceler à l'horizon, et il y a fort à craindre pour l'avenir. Elus, élues, le tonnerre gronde. Que ferez-vous ? Que ferons-nous ?

 

 

collectivite territoriale suppression referendum copie--> Suppression de la condition de referendum et retour du Conseil Unique d'Alsace (29 août 2014) - où l'on apprendra que dans le cadre de la loi sur la fusion des régions un amendement vise à supprimer la condition de referendum pour les fusions et modifications de collectivités territoriales. Et de voir les partisans de la Collectivité unique reprendre du poil de la bête...

 

 

 

 

L'analyse des résultats du  7 avril 2013 :

infographie-les-resultats-du-referendum

 

--> En Alsace, c’est  « non » ! (9 avril 2013) - (où l’on trouvera des éléments d’analyse pour comprendre les résultats du 7 avril 2013 et faire le bilan de la campagne référendaire).

 

 

 

Dix raisons de voter non  en 2013 :


--> schema-referendum_cta.pngDix raisons de voter non : ce projet est une usine à gaz complexe qui, loin de permettre des économies risque bien de nous coûter cher. En participant à l'émiettement institutionnel de la France, il nous affaiblira sans doute plus qu'il nous renforcera. C'est un projet précipité et flou, sans aucune vision d'ensemble, et qui sert de cache-misère politique. Sur fond de crise de confiance généralisée et de fantasmes autonomistes, nos élus risquent de s'enfermer dans une bulle, car la proximité annoncée n'est qu'illusoire. Refusons le chèque en blanc.

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